Poétesse ... écrivain ... funambule des mots

Je me croirais presque en été chez moi ... le ciel est d'un bleu à rendre verte de jalousie la mer Méditerranée ... les vagues viennent mourir à quelques millimètres de mes pieds ... la mélodie du ressac berce mes pensées alors que le soleil darde ses rayons ... réchauffant ainsi mon cœur ... l'air embaume de cet arôme maritime si particulier ... Ici c'est la saison morte ... ce qui me convient à merveille ... j'évite ainsi la cohue touristique ... bien que je sois une touriste me ferez vous remarquer ... pour l'heure ... mes seules compagnes sont une mouche et une fourmi ... auraient-elles décidé ... elles aussi ... de profiter de la douceur climatique ???

Je regarde l'horizon gris bleuté ... où sont posés quelques nuages blancs ... pour un peu ... je pourrais les caresser du bout des doigts en tendant le bras ... sont-ils aussi soyeux qu'ils le paraissent ??? Mon regard quitte l'horizon pour revenir vers le rivage ... et la mer passe du gris bleuté au vert ... mais oui ... il semble bien qu'elle soit verte de jalousie du bleu de l'océan céleste ... pourtant elle n'a rien à lui envier ... sa beauté est à couper le souffle ... par-ci ... par-là ... les rouleaux grandissent ... forment des vagues ... l'écume blanche danse avec la grâce d'une ballerine et la légèreté d'une plume ballottée au vent ... Roulement de tambour suivi du clapotis du triangle pour finir dans un souffle de flûte ... et comme venu de loin ... les accords graves et sensuels d'un saxo répondent aux notes mélancoliques du violon que j'ai dans le cœur ...

J'admire ce ballet maritime que m'offre Neptune ... Je ne me lasse pas de ce spectacle ... quand soudain la quiétude est dérangée par un plaisancier filant à toute vitesse sur les flots ... traçant dans son sillage une cicatrice blanchâtre que la mer s'empresse d'effacer ... sur le moment ... j'ai envie de l'interpeller pour lui dire ... arrête le moteur et prend le temps d'admirer ce que la mer t'offre de plus beau ... vois ses changements d'humeur et entends les gémissements qu'elle pousse" mais il est déjà loin ... sourd et aveugle à tout ce qui n'est pas son confort et son plaisir égoïste ... Au fond du cœur ... quelques larmes de compassion pour cette mer si généreuse et pourtant si malmenée par l'Humain ... où sont les marins d'antan qui la respectaient et la vénéraient comme une déesse ???

Le soleil est quasi à son zénith ... le vent léger transporta t les gouttelettes iodées atténue la chaleur de l'astre  ... les rayons se réverbèrent sur la surface de l'eau ... lui conférant une teinte argentée ... en perpétuel mouvement ... inlassablement ... la Méditerranée est une immense toile changeante à ciel ouvert ... Comme j'aimerais être un oiseau pour l'admirer de tout là-haut ... tantôt d'argent ... tantôt d'étain ... et parfois à l'éclat de diamant ... elle se jette au pied de la fal

aise ocre où j'ai trouvé refuge ... des badauds passent ... indifférents à la scène grandiose qui s'étale à perte de vue ... et je m'interroge ... suis-je encore normale ??? aurais-je des verres de lunettes déformant ??? suis-je la seule à percevoir ce somptueux spectacle ??? Comment ne pas être en communion avec les éléments quand on est face à cela ??? L'humanité aurait-elle perdu son âme pour être aussi indifférente ... au point de ne plus s'émouvoir face à ce que nous offre Dame Nature ??? Si c'est le cas ... j'espère de tout cœur ... conserver ma différence  ... garder ma capacité à m'émerveiller devant cette beauté sauvage ... et être cataloguée à tout jamais de "pas-normale" !!!

J'ai passé la matinée en compagnie de Dame Nature et j'ai pas de mots assez forts ... ni assez élogieux pour lui rendre hommage comme il se doit ... Je pense qu'il faut le vivre avec chaque fibre de son être ... fermer les yeux et regarder avec le cœur et son âme pour sentir vibrer au plus profond de soi cet interlude hors du temps ... J'ai vécu ces instants avec l'intensité de la "dernière heure" ...

©Mannuella Iseni